Les images sont omniprésentes dans nos sociétés hyperconnectées. Il est quasiment impossible de leur échapper.
Chaque jour, on estime que plusieurs milliards de photos sont partagées sur les réseaux sociaux.
· Facebook : 350 millions de photos sont téléchargées chaque jour.
Instagram : 100 millions de photos sont partagées quotidiennement.
WhatsApp : 700 millions d'images sont échangées chaque jour via les messages.
En regroupant toutes les plateformes majeures, chaque jour plus de 3 milliards de photos sont mises en circulation à l’échelle mondiale. Ces chiffres montrent à quel point les images sont devenues un mode d'expression et de communication central dans notre société.
Annie Le Brun, dans Ceci tuera cela, image, regard et capital écrit :
Si quelqu’un passait 80 années de sa vie à visionner sans dormir Instagram, il ne pourrait voir que l’équivalent de ce qui est diffusé sur la plateforme en 7 minutes.
Vertigineux, n’est-ce pas ?
Au cours du siècle passé, un véritable changement de paradigme s’est opéré : d’un monde où la photographie enregistrait et fixait les choses, nous sommes passés à un monde où prolifèrent anarchiquement les images. Celles-ci sont devenues fragiles, éphémères, pour la plupart jamais fixées, jamais rangées, perdues à jamais au milieu d’autres, confinées dans les disques durs de nos ordinateurs, cartes mémoires ou téléphones portables…
Prenons-nous seulement le temps de regarder ces images qui défilent à la vitesse de l’éclair sous nos yeux et sous la pulpe de nos doigts ? Prenons-nous le temps de les classer, d’échanger de nous interroger à leur sujet ? N’attendons-nous que des likes et ce plaisir éphémère et addictif qu’ils nous procurent en postant ces images sur les réseaux sociaux ? Que disent-elles vraiment de nous, de notre rapport au monde, aux autres et à notre histoire ?
Curieuse époque où L’image ne montre plus, mais se montre. Elle ne se regarde plus, elle se partage. (Annie Lebrun)
Alors prenons le temps de respirer, sortons de cette « prison d’images ». Dans un monde de prolifération incontrôlable des images, la pratique de la Photo-Thérapie Analytique® s’affirme comme un acte de résistance face aux diktats économiques de la visibilité et de l’instrumentalisation.
Là où nous ne faisons qu’effleurer les images, la Photo-Thérapie Analytique® se propose, elle de les creuser, de gratter la pellicule qui les recouvre, de les interroger et de nous interroger à travers elles.
Les images, d’une grande puissance affective et émotionnelle nous hypnotisent. Il n’est qu’à voir le regard gourmand et aussi un peu inquiet des participants qui rentrent dans mon atelier pour la première des 10 séances de photo-thérapie que je propose. Sur la grande table sont disposées une centaine de photographies de toutes sortes. Tout un maelstrom coloré, tout un monde dans lequel ils sont invités à s’immerger pour ne choisir qu’une seule image. J’ai beau leur parler, ils ne m’entendent déjà plus, absorbés par un dialogue secret entre elle et eux. Ils font le tour de la table, laissent se promener leur regard. Et une image ou deux les attirent comme un aimant. Rapidement, ils la sortent du lot. Ce choix premier n’est jamais le fruit du hasard et en dit long. Le travail photothérapeutique a déjà commencé.
Qu’est-ce la photothérapie Analytique® (PTA) ?
La PTA est une méthode introspective et créative. Elle repose sur un ensemble de techniques extrêmement puissantes et créatives qui utilisent la photographie comme outil afin d’aider les personnes à explorer leurs émotions, leur inconscient, leurs relations avec eux-mêmes et les autres, leurs relations familiales. Elle s’appuie sur les apports de la psychanalyse jungienne, de la psychanalyse transgénérationnelle et des processus art-thérapeutiques.
En pratique, elle consiste à travailler soit à partir d’images choisies par le thérapeute soit d’images personnelles prises ou collectées par les patients.
L’objectif est dans un premier temps, par l’intermédiaire d’échanges entre le thérapeute et son patient, de faire remonter à la surface de la conscience des souvenirs, des émotions, et des événements parfois profondément enfouis. Les images, facilitent et provoquent cette verbalisation.
Dans un second temps, ces souvenirs, émotions, événements… constitueront autant de matériaux qui vont pouvoir être élaborés et servir de base à la créativité ainsi qu’à de nouveaux échanges.
Toutes les séances de photo-thérapie comportent ce double mouvement d’exploration et de transformation des images. Le tout permettant d’initier une transformation personnelle.
La Photo-Thérapie Analytique® peut venir à l’appui d’autres méthodes thérapeutiques et permettre un passage plus aisé à la verbalisation.
Photothérapie Analytique® et activité projective
« Dans une photo, nous mettons le sens que nous voulons et nous prenons le sens dont nous avons besoin. » (Judy Weiser, Phototherapy Techniques, Exploring the Secrets of Personal Snapshots and Family Albums)
Les images sont puissantes. Elles ont le fabuleux pouvoir de nous reconnecter à notre passé, à des instants marquants et parfois traumatisants de nos vies. En thérapie, ces images deviennent un support pour faire remonter des émotions refoulées ou des pensées inconscientes.
Pourquoi ?
Parce qu’on ne prend ni ne choisit une image par hasard, Chaque image que nous choisissons nous symbolise, nous représente ; chaque image que nous produisons, à travers les différents choix que nous faisons (cadrage, lumière, choix du sujet…) constitue une forme d’autoportrait, une image de nous-même.
Si le thérapeute propose une même image à plusieurs personnes, aucune n’en parlera de la même façon. Ce qui est tout à fait normal. Forcément, sur une image, nous projetons toujours du déjà vu, du déjà vécu, du déjà ressenti. A proprement parlé, nous ne voyons rien, nous ne faisons que revoir et extrayons d’une image ce qui est indispensable pour nous. C’est ce qu’on appelle le mécanisme de projection.
« Qui aurait pu dire qu’une photo d’un escalier en colimaçon susciterait tant de réflexions sur ma propre vie ? » a conclu lors d’une séance une participante. Et oui, une simple photo d’escalier qui tourne à l’infini et les mots, les associations d’idées, les souvenirs, les réflexions s’enchaînent, révélant une vie qui tourne en rond, un cercle vicieux dont on a du mal à sortir, des actes répétés...
Comment cela fonctionne-t-il ?
Lorsque nous regardons une photographie, notre regard est immédiatement attiré, happé par un détail, infime parfois. Ce détail que Barthes dans « La chambre Claire » nomme punctum va servir de catalyseur et de déclencheur à des associations d’idées, faire remonter à la conscience des émotions, des sensations, des souvenirs et parfois des traumatismes verrouillés profondément jusque-là dans l’inconscient. En effet, comme les images sont non verbales par essence, elles ont la capacité de rentrer en contact direct et immédiat avec notre inconscient.
Comment pratique-t-on la Photo-Thérapie Analytique® ?
La PTA se pratique avec un thérapeute formé, en individuel ou en groupe, en cabinet ou en institution en utilisant différentes techniques. A ce titre, j’ai élaboré un protocole de base de 10 séances qui permet d’explorer en profondeur et de manière progressive les multiples aspects de l’identité et de l’histoire de la personne. A ce protocole peuvent se greffer d’autres séances pour travailler sur des problématiques particulières. Ce protocole est donc adaptable et modulable en fonction de la demande.
Les différents types de photographies utilisées en Photo-Thérapie Analytique®
Il est possible d’utiliser toutes sortes de photos : en bon ou mauvais état, avec une valeur artistique ou non, provenant de journaux, d’Internet, collées sur le frigo, dans le portefeuille, tirées d’album photo, de son téléphone portable, de radios ou scanners …. En photo-Thérapie Analytiques®, nous travaillons à partir de :
- Photos - projections
- Images de soi : photos d’identité, portrait et autoportrait
- Photos prises ou trouvées par le participant lui-même
- Albums de famille et les autres photos de famille
- Photos liées à des lieux de vie
- Images fantômes (toutes les images que, pour une raison ou une autre nous n’avons pas sous les yeux )
- Images dites « ratées » (floues, tronquées, obscurcies…)
- Photographies comportant des ombres et de reflets
- Photographies produites par IA
- Imagerie médicale
Chacun de ces types de photos va permettre de travailler sur une ou des problématiques différentes.
Concrètement comment se déroule une prise en charge ?
Après un entretien permettant de retracer l’histoire (anamnèse) et les besoins de la personne, un protocole de 10 séances est mis en place. Pour chaque séance, le patient est chargé de collecter ou de produire des images selon des consignes données (réalisation d’autoportrait, création d’un journal photographique…)
Dans un premier temps, le photothérapeute et son participant échangent autour des photos. Ce dernier est invité à exploiter et à explorer les affects qu’il projette sur elles et ce qu’elles réveillent/révèlent en lui (souvenirs, associations d’idées…)
Les projections sont favorisées par des exercices : imaginer l’histoire de l’image, son hors-champ, dialoguer avec elle ou entre elles, parler à travers l’image…
Dans un second temps l’échange et le jeu autour des images sont complétés et enrichis par un travail d’écriture (description, scénario, roman photo, récit, lettre…) puis dans un troisième temps par des activités plastiques ou photographiques : reconstitution d’albums ou de photos, collages, théâtre d’ombre, photomontages, installations, carnets photographiques, création de séries… Les possibilités sont quasi infinies !
Les objectifs de ces activités sont de déployer le sens des images, et, par le biais du détour et du jeu, de symboliser des affects parfois douloureux. La Photo-Thérapie Analytique@ permet également, grâce au travail créatif de sortir d’une forme de ressassement. La prise en main de l’appareil photo permet également de redevenir sujet/acteur de sa vie.
En quoi la Photo-Thérapie Analytique® est-elle thérapeutique ?
Il est possible de mettre en évidence un certain nombre de qualités du processus photographique. La Photo-Thérapie Analytique® permet de :
- Explorer son identité
Autoportraits, portraits, albums de famille, images de vacances, d’endroits où nous sommes passés ou nous avons vécu ; tout contribue à construire une image de nous en tant qu’individu unique ou faisant partie d’un groupe social/ familial. La photographie peut offrir des occasions d'explorer la manière dont nous nous voyons, comment les autres nous perçoivent et comment nous souhaitons être vus.
- Mieux comprendre son passé et renouer avec son histoire personnelle
Les photographies de famille nous engagent à revisiter notre généalogie et notre enfance. Elles réveillent des souvenirs, éclairent la face cachée derrière l’image parfois stéréotypée et idyllique de la famille. Elles permettent de comprendre certains actes ou faits répétitifs, de se raccorder à certains membres de son arbre généalogique, de se situer dans le cercle familial, de travailler sur la notion de lien…
- Agir comme une distraction et offrir un apaisement
Pour certaines personnes qui souffrent de douleurs chroniques ou suivent des traitements douloureux, la pratique de la photographie offre un répit et une occasion de se distraire. Photographier dans la nature offre une grande source d’apaisement en ralentissant le rythme cardiaque.
- Offrir un cadre sécurisant et remettre de l’ordre dans le chaos
Pour des personnes souffrant de stress post-traumatique, l’utilisation et le dialogue autour des images permettent, par le biais de la narration, de remettre de l’ordre dans ce qui semblait confus, de rétablir les faits dans un ordre chronologique.
- Mettre de la distance
En écrivant des histoires à partir des photographies, en photographiant quelque chose, nous l'objectivons. La photographie qui en résulte devient elle-même un objet. Grâce à la photographie, nous prenons nécessairement de la distance par rapport au sujet de notre image. Cette mise à distance crée un sentiment de sécurité.
- Surmonter les obstacles liés à l'expression verbale.
Les images peuvent compenser une déficience verbale, une incapacité à verbaliser ou aider à communiquer avec des personnes qui parlent d'autres langues. En l’absence de mots, la photographie offre un langage visuel alternatif et favorise de nouvelles formes d’expressions.
- Fournir des possibilités de jeu
Grâce aux images, nous pouvons créer de nouvelles réalités, être quelqu’un d’autre. Nous pouvons être stupides, sérieux, construire un monde imaginaire, voyager à travers le temps, être d’un autre genre. Ces jeux permettent de jouer avec les différentes parties de nos personnalités, de nos je et d’en prendre conscience.
- Réactiver la mémoire et recréer du lien
Dans le cadre de troubles neurodégénératifs comme celui de la maladie d’Alzheimer, le contact avec des photographies permet aux personnes de retisser des fils avec leur passé, de (re)vivre des émotions, de renouer un dialogue et parfois d’entamer un travail d’écriture.
- Restaurer la confiance et de l’estime de soi
Inévitablement, l’ensemble du processus permet aux participants d’avoir une meilleure estime de soi. Grâce à lui, il devient plus créatif, davantage conscient de ce qu’il veut et des moyens pour y parvenir.
A qui la Photo-Thérapie Analytique® est-elle destinée ?
La Photo-Thérapie Analytique® est destinée à tout le monde, petits ou grands. Pour utiliser un appareil photo, nul n’est besoin d'une formation approfondie ni de connaissances spécifiques. Parler et échanger autour des photographies est simple et immédiat. La photographie offre une invitation ouverte à jouer, (s’)explorer et (se) (re)découvrir.
La Photo-Thérapie Analytique® est indiquée pour surmonter un deuil, un traumatisme, une dépression, une dépendance, prévenir les risques psychosociaux, pour travailler sur les troubles du comportement alimentaire, de l’identité, restaurer l’image du corps, solliciter la mémoire chez des personnes atteintes de troubles neuro dégénératifs… On peut la pratiquer en individuel pour mieux se connaitre dans le champ du développement personnel mais aussi du social (réinsertion sociale, réfugiés…) et également en entreprise.
Pour les professionnels de la santé mentale, la PTA est un outil puissant qui permet d’accroitre l’accès aux émotions, de travailler sur des traumas, et d’enrichir la pratique clinique.
A ce titre, il est possible de suivre les 4 modules de 2 jour à la formation.
La Photo-Thérapie Analytique® : un voyage intérieur
En offrant un espace de réflexion et de créativité, la Photo-Thérapie Analytique® transforme notre regard et notre rapport aux images en un acte thérapeutique. Plus qu’une méthode, c’est une invitation à se raconter autrement et à se réconcilier avec soi-même à travers le prisme des images.
Dans un monde où les images défilent trop vite, la PTA nous rappelle qu’il est possible de prendre le temps de regarder, ressentir et transformer. Elle fait de la photographie un outil puissant pour redonner du sens, explorer l’inconscient, et amorcer une métamorphose personnelle durable.
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